Le Traité sur la Charte de l’Energie, climaticide ?

Le Traité sur la Charte de l’Energie est un accord multilatéral reliant des Etats et des géants de l’énergie (pétrole, gaz…) qui permet aux investisseurs étrangers d’exiger de la part des États des compensations si un changement dans la législation dans le secteur de l’énergie s’avère défavorable aux investissements et bénéfices escomptés. Les sommes qui en découlent se comptent souvent en milliards de dollars.

Un consensus scientifique a été formulé quant à la nocivité de ce traité, même modernisé. Le GIEC l’a également dénoncé comme barrière à l’action climatique, destiné davantage à la protection des intérêts des investisseurs.

La simple évocation du traité est même suffisante pour dissuader les législateurs d’adopter quelconque législation contraignante envers les énergies fossiles. La loi Hulot sur l’arrêt de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures a par exemple été vidée de sa substance par la simple menace de la société canadienne Vermillion.

Créé en 1994 dans un contexte de post-guerre froide et de dislocation du l’Union soviétique, le TCE avait pour objectif de protéger les intérêts des compagnies occidentales dans la région et de sécuriser l’approvisionnement à l’ouest. Cependant, le contexte géopolitique a changé, la Russie s’en est retirée en 2009 et le traité s’avère plus que jamais climaticide.

Le TCE protège ainsi le statu quo en faveur des énergies et favorise par conséquent les émissions de gaz à effet de serre. Dans son état actuel, il a un impact défavorable sur la souveraineté des Etats mais aussi sur la démocratie. Les avancées réclamées par les populations en termes de transition écologique et sociale ne sont pas mises en place, les accords signés par les Etats ne sont pas respectés.

Dans la mesure où les défenseurs du TCE nient le fait que le traité menace la neutralité carbone, et soutiennent que même qu’il est indispensable à la transition énergétique une modernisation compatible avec les enjeux climatiques actuels, les Accords de Paris ou encore le Pacte Vert européen semble impossible. Si la sortie ou la suppression du TCE peuvent s’avérer ardu étant donné les obstacles à franchir, plusieurs options restent possibles.

  • La suppression de la “clause de survie”, qui prolongent de 20 ans les effets du traité après qu’une partie contractante en sorte (l’Italie, retirée en 2016, est “aujourd’hui poursuivie par la compagnie pétrolière et gazière Rockhopper suite à un moratoire sur les forages offshore”).
  • La suppression également du mécanisme d’arbitrage ISDS (investor-State dispute settlement) qui permet aux entreprises d’attaquer un Etat. Présent dans de nombreux accords de libre-échange dont le TCE, ce mécanisme a été dénoncé par le GIEC comme barrière à la mise en place de politiques efficaces. 
  • Certains défendent cependant que seul un retrait, voire un retrait collectif de l’UE et ses Etats membres permettrait d’être à la hauteur des enjeux. La France ou encore l’Espagne et d’autres pays de l’UE ont considéré cette option sérieusement.

Sources : Centre national de coopération au développement, Bon Pote, National Geographic, Camille Etienne, IISD, Vert.